Les visuels de Kori Kori sont créés à partir des peintures de Enrique Jimenez.Tous droits réservés.
A une époque où se cultive le chacun pour soi, nous continuons de penser que l’avenir n’appartient pas à un seul homme mais au groupe. Pas dans le sens du groupe qui uniformise, mais bien dans celui qui sublime le savoir-faire des uns et des autres, à l’instar de l’émotion que procure un chœur d’opéra, dans lequel s’associent des voix différentes, pour faire naître, à l’unisson, une voix qui n’existerait pas sans cette fusion.
Dans l’histoire du théâtre, le chœur représente souvent la masse, témoin actif ou passif mais rarement maître de son destin. Dans notre proposition, nous souhaitons lui donner ici le premier rôle, celui d’un chœur de femmes et d’hommes libres.
Avec Kori Kori, nous continuons notre travail sur le chœur en mouvement, en axant prioritairement notre réflexion sur l’interprétation et sur une scénographie épurée, mettant alors à profit l’ensemble de nos expériences dans les domaines de l’image, du mouvement, de la musique, du chant et du jeu.
Ce spectacle déambulatoire, présenté de jour, reste un grand format, pensé pour être ressenti par 1500 à 2000 personnes selon l’espace d’évolution. Dix-huit interprètes - comédiens, chanteurs et danseurs - évolueront sur une musique originale et jouée en direct par une formation de quatre musiciens.
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NOTES D’INTENTION
– Enrique Jimenez, scénographe
Assis sur une chaise…
Quelquefois, le regard devient un livre d’images
Et le monde est peint là-dessus.
Fragile, égaré, troublé, charmé, dilapidé
Soleil dispersé…
Je prétends faire ce que je sens,
Sans penser que je le sens.
Je prétends adosser la couleur à l’idée
Et n’avoir pas besoin d’un couloir
Entre la peinture et les mots.
Ressentir tout de toutes les manières
Etre la même chose de toutes les
Façons possibles en même temps.
Avoir toutes les opinions. Et être
Sincère en me contredisant à chaque minute.
… Assis sur une chaise dans une salle de gare…
Assister à la métamorphose des chaises
Rencontre conviviale, chaises traits d’unions,
Chaise sonore instrument de musique
Ou partenaire sur un pas de tango,
Chaises tribunes, chaises résistantes pour
Finir érigées en barricade.
– Jean-Raymond Jacob, auteur-metteur en scène
Ce spectacle n’a pas d’histoire, il en raconte plusieurs.
Il n’est pas didactique, ne détient pas de vérité,
simplement des histoires de femmes et d’hommes, en mouvement, comme la vie.
Un choeur émouvant, d’un état à un autre, sincère.
Un livre d’images.
Un spectacle facette sur la vie de l’humanité.
Le fait humain, simple et compliqué, comme la vie.
Une allégorie où se côtoient le lyrique et le rock, la valse et le tango, le flamenco et le classique.
Beau.
Insoumis.
Pas de logique, comme le monde.
Un spectacle qui apparait, échappe et disparait.
– Pascal Le Guennec, co-auteur, directeur d’acteurs
Depuis plus de 20 ans, je travaille avec la compagnie Oposito, d’abord comme comédien et, depuis 2008, à la direction d’acteurs. Cette compagnie propose, à travers ses spectacles, une aventure humaine et artistique d’importance.
Le chœur a toujours été au centre des créations d’Oposito et, en fonction des projets, il a pris des formes différentes. Cette fois-ci, c’est le chœur lui-même qui est le thème du spectacle, de l’histoire ; il en est le héros.
Quel regard portons-nous, aujourd’hui, sur cette forme mythique ?
Des comédiens et comédiennes venus d’horizons très variés contribueront, par la diversité de leur art, à créer une représentation du chœur contemporain.
Comme dans un livre d’images, la parole sera réduite au minimum. Avec pour seul accessoire, une chaise, le chœur personnage enchaînera les images, transformera les espaces et les lieux, racontera son histoire. Il sera, bruiteur, musicien,chanteur, danseur...
Le jeu des acteurs, les gestes et les mouvements seront stylisés pour arriver à une transposition théâtrale et poétique d’un langage universel du chœur. Virtuosité et dextérité seront de mise.
« Et ce que le théâtre peut encore arracher à la parole, ce sont ces possibilités d’expansion hors des mots, de développement dans l’espace, d’action dissociatrice et vibratoire sur la sensibilité. »
« Le Théâtre et son double » (1938) - Antonin Artaud
– Michel Taïeb, compositeur musical
Une musique qui bat en nous, commune, que l’on transporte, qui s’inscrit dans notre mémoire collective. Des chansons, des airs, des mélodies, colportés, parfois déplacés de pays en pays, mais que l’on partage pour ne pas les oublier.
Le chœur, c’est la transmission.
On partage en musique, en chanson, les plaisirs et les peines, fêtes, deuils, luttes, victoires et défaites.
En chœur,ensemble, pour porter et supporter les instants forts de nos vies.
Notre chœur ne se soucie pas du genre ou du style, il doit être singulier, mélanger les individus et les rassembler autour d’une même idée.
On chante, on joue, on frappe, gratte, pince, crie… tous dans la même direction… une même voie, une seule voix… l’émotion.
Un accordéon, une clarinette, un violoncelle, une guitare électrique, des percussions, des voix… comme véhicule pour transporter notre humanité.
– Nathalie Pernette, chorégraphe
Je suis une chorégraphe du petit nombre et de la miniature...
Participer à un projet réunissant 18 corps et autant de chaises, pour une grande jauge public, est un défi à relever !
Mais la matière de cette création à venir reste profondément et "simplement" physique...
Un corps à corps permanent avec une chaise, tout d’abord, dont je contribuerai par l’exploration, à épuiser les richesses et les possibles : surface de jeu, pleins et vides, scène minuscule saturée de courses immobiles, socle piédestal pour une danse de bras.
Chaise-partenaire aussi, d’un tango sensuel, ou objet à manipuler telle une arme lourde ou tranchante.
Chemin de chaises instables pour une danse de revue fragile...
Chaise-excroissance enfin, véritable partie de soi dans un monstrueux amalgame.
Je chercherai enfin la matière d’un corps à corps avec l’espace et d’autres humains, pour des séquences dansées, à la manière d’un bal ou d’une "conversation" aux allures de défi...
Danses inspirées du monde entier, danses hybrides héritées du classique ou du jazz...
Il s’agira, dans tous les cas, de faire naître le mouvement, puis de le dissoudre dans la justesse de l’instant.
– Jean-Philippe Dejussieu, chef de chœur
Je hais les solistes, les one (wo)man show et autres stand-up, ainsi que les danseurs étoiles…
Je n’aime pas ceux qui vous forcent à respirer à leur propre rythme, qui ne regardent la foule que pour la mener ou la combattre, qui sont incapables d’écouter tellement ils n’entendent qu’eux, stratèges à leur seul service.
J’aime passionnément les individus, ceux qui sortent de la foule pour plaider la cause, qui se mettent en avant afin que l’on porte son attention à ceux qui sont en arrière, ceux qui prennent pour partager, ceux qui font « partie de… ».
Mais au delà de tout, j’aime les ensembles, les orchestres, les collectifs et les chœurs. J’aime ce risque que comporte l’attention aux autres, et aussi le temps qu’elle demande.
C’est à ce partage, à cette écoute, à ces regards croisés, à cette respiration profonde que je veux contribuer en travaillant avec la compagnie Oposito sur ce spectacle. Un chœur chantant chacun pour tous, un groupe qui regarde où l’autre marche, une énergie qui soude et rayonne à la fois, un guide qui suit…
– Fabienne Desflèches, costumière
Les costumes de ce(s) choeur(s) seront uniques, multiples, habités, transformés, mutés habilement comme autant de facettes du genre humain.
De surprise en surprise, ce choeur de comédiens / comédiennes nous entraine, public, vers autant de couleurs, de matières, de silhouettes… tableaux travaillés comme des peintures abstraites ou identifiés comme « habits fonctionnels /culturels ». L’imaginaire de ce choeur – tout comme le nôtre – s’impose à chaque changement de tableau et l’on glisse habilement d’un univers à l’autre.
Chaque individualité de ce choeur – petite et unique partie du tout – participe à l’éventail du genre : homme, femme, enfant d’un bout à l’autre du monde. Tous lui confèrent cette humanité : l’idée que chaque humain s’habille, se couvre, se pare, se colore, intervient sur son corps et c’est ici que le costume révélera cette fonction « humanitaire » universelle.
Cette réflexion se fera dans une grande liberté mais aussi dans la contrainte du changement à vue : « homme-tortue » astucieux qui se réinvente au gré des mouvements.
Imaginons alors comment ces costumes « scénographiques » se révèleront hauts en couleurs, en émotions, tous pareils tous différents mais tous battant d’un même cœur.
vendredi 18 octobre 2019