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Martine
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Lundi 23 août

Je n'ai pas encore écrit sur le carnet de bord. Après l'Ethiopie, qui était une tout autre histoire, j'aurai l'impression d'être fade, alors je vais vous raconter une partie des préparations pour les 2 représentations de Cinématophone.

Ce matin, repérage pour Cinématophone à Alex (Alexandra), un township à l'opposé de Soweto au Nord Ouest de Jo'Burg.
Une des églises luthériennes va nous servir de loges, une batisse toute simple, qui sert de lieu de réunions, de répétition, un endroit très vivant pour la communauté. Le pasteur, un homme à la stature imposante, nous reçoit calmement. Une marche dans les rues alentours s'impose pour trouver au mieux le parcours du déambulatoire.

La blonde Sarah et la brune Martine déambulent, aucun regard agressif, ni violence directe, je me sens plus en sécurité qu'au centre de Jo'burg. J'arpente, descends, remonte la rue… La place en haut de la rue est un endroit tout à fait possible pour le spectacle, mais samedi est jour de marché, et ici la foule va être dense… Si l'on pouvait trouver un autre endroit… Trevor, le pasteur, nous propose de jouer en fixe avec le public assis, ce n'est pas ce que je recherche, Cinématophone n'est pas un spectacle à entendre et voir en statique. Nous retournons à l'église prendre la voiture, et arrivons à une sorte de parking pentu protégé, grillagé, verrouillé attenant à un stade. L'endroit donne une bonne ouverture si nous avons un nombreux public. Je remonte au carrefour où une longue rue montante prend naissance. Une cahute éléctrique peut faire un perchoir bien placé pour la Diva. Je remonte la rue. La première intersection, à moitié défoncée par des travaux, peut être le point de départ du spectacle. Nous pouvons arriver des loges en camion, apparaître façon surprise, et créer le déambulatoire. Poser bien à vue la Diva en bas de la rue sur le perchoir, nous arrêter un moment sur le parking de bonne visibilité pour le public éloigné et reprendre la rue en déambulatoire.

Faire que ce spectacle déambule.
Faire qu'un maximum de personnes puisse le voir.
Faire que notre groupe d'acteurs soit sur le même feeling ce jour là, que l'on puisse donner et recevoir pour ne pas passer à côté d'une rencontre avec ce Public.
Faire de ce spectacle, qui est aux antipodes de la culture africaine, un moment d'émotion qui restera dans les mémoires… Nous n'avons pas les mêmes références culturelles, le même humour.
Nous allons paraître des extraterrestres dans nos costumes de parade, alourdis des machines, diffusant des sons "électroacoustiques".

Et puis, il y a 3 acteurs nouveaux, cela fait un tiers de l'équipe, c'est beaucoup. Il y la structure du spectacle à apprendre. Ce n'est pas le plus dur, même si nous allons répéter avec la moitié de l'équipe - Fabienne, Philou, Benoit, Achil continuant leurs travaux pendant ces deux répétitions. Dans ce peu de temps il faut surtout que je travaille l'ouverture à réagir vite et juste, les possibilités du Groupe à inventer au fur et à mesure que le spectacle se déroule (certain appellerons ce phénomène "improvisation", moi je l'appellerai "adaptation").

Bon… Je raconterai la suite.
Demain je vais en repérage à Soweto, Sud-Est de Jo'Burg.
Je viens de recevoir la visite de Benoît, mon voisin de chambrée, il m'a coincé le vasistas au-dessus de ma porte qui était tombé. Ce soir le vent souffle fort, et il fait froid. Je vais prendre une douche à l'étage. J'ai préféré rester dans une petite chambre de luxe sommaire, j'ai deux couvertures et une moquette. Tout va.

Mercredi 1er septembre

1er jour du printemps, je reviens d'Alex, un rendez-vous radio 89.1, pour annoncer Cinématophone samedi.
Les filles qui reviennent de l'école jettent des regards malicieux à chaque coin des bâtisses, les garçons embusqués les attendent, seau d'eau en main. Les éclaboussures fusent entre les taxis collectifs qui, à cette heure, sont en plein trafic. Eclats de rires… C'est le printemps…
Le boucher vend sa viande… Devant la boutique un braai fume, vous pouvez donner votre cuisse de poulet à griller et l'emporter.
Le coiffeur sur le trottoir rafraîchit les nuques une tondeuse à piles en main…
Humeur de l'Afrique.
Je ne vois pas de haine dans les regards croisés, ni de mépris - Ou si peu -
Je sens une espèce d'indifférence.

Comment se sentir bien dans ce pays où les "Blancs" ont fait tant de mal, il y a encore si peu de temps.
Je ne suis que de passage, j'ai la peau blanche, quand je parle on m'écoute, où l'on fait semblant, j'ai une bouche de Blanche.

Pourquoi n'y a-t-il que des jeunes danseurs à la peau noire sur le stadium le jour de l'ouverture des African's Games ?
Il paraît que la ségrégation est en voie de disparaître chez les sportifs… Y aura-t-il des athlètes blancs, métis, indiens dans les compétitions ?….. Ou simplement beaucoup de Noirs parce qu'ils sont meilleurs que nous !

Ce soir l'esprit un peu morose dans ma petite chambre… une sorte de passage à vide, pas d'inquiétude. Les répétitions avancent avec les jeunes. Elles se passent bien avec une écoute attentive du projet. Demain nous travaillons avec toutes les poupées habillées… belle image en perspective…

Samedi 4 septembre

Cinématophone à Alexandra.

La Diva se démène dans la foule, elle cherche comment mener la troupe, où poser l'image, dans quel sens aller… Pour avoir une vue de la situation, elle monte sur un rebord de talus, où est déjà perché le public surpris de voir sortir d'un camion des blancs blanchis. Et là, en équilibre, plaquée sur une palissade de grillage, sa nuque se bloque… Sa chevelure abondante de pellicules cinéma se prend dans les fils de fer barbelés - éléments incontournables du pays - Quelques rotations du cou, les épines métalliques s'agrippent au rhodoïd, l'équilibre est précaire, elle se voit pendue dans le vide par la perruque, boulle blanche oubliée sur fond de terrain vague. Un autochtone à son côté, lui tend le sac en plastique qu'il tient - élément incontournable de la planète, le sac en plastique - et l'aide à s'extirper des griffes d'acier. Le sac en plastique est redonné à son propriétaire, la Diva repart…

Dimanche 5 septembre
Martine et Roger

Essai d'humeurs sonores dans le Stadium

Là haut, dans les tribunes présidentielles le staff directorial s'affaire, il paraît qu'il y a plein de monde qui s'affole sur les tops… Nous, en bas, très, très en bas, dans l'arène verte nous essayons de comprendre "nos ordres". En l'occurrence ce que Jean Raymond espère voir sur la pelouse…

La musique tourne sur la sono de répétition bien trop faible pour capter nos tops musicaux. Penny lance désespérément des consignes pour remettre ses lignes en lignes. Les percussionnistes Zoulou qui commencent à s'ennuyer frappent le rythme…
Oh ! il nous semble entendre des mots en français… la voix étouffée de Jean Raymond raisonne dans le stade, incompréhensible… nos oreilles se tendent, on se regarde l'air dubitatif… "Qu'est ce qu'il dit ?". S'enchaînent des phrases en zoulou pour diriger les danseurs perdus au milieu du stade… la musique tourne toujours…

Le téléphone dans la poche sonne, c'est Jean Raymond, qui de là-haut passant par Paris, nous prévient qu'un filage va commencer… Aaaaaaaahh !
Les mégaphones sur le terrain braillent des recommandations aux 3000 danseurs de Penny… et ces 3000 personnes enchaînent un brouhaha… D'après nous ils sont en train de briffer tous les "ousins" - nous vous raconterons notre théorie de Cousins plus tard - Chez nous ça s'organise…. ou presque ! Notre tunnel, qui correspond à nos coulisses, joliment appelé Porte Delta, commence à prendre vie, et quelle vie ! Entre temps la nuit est tombée, et dans le tunnel il fait noir, noir comme dans un estomac de vache (expression de mon co-writer, mon cousin suisse).
Allez… il faut organiser la mise en place dans le tunnel… Roger, tel une maman poule, casquette en suisse allemand, organise le rassemblement des jeunes danseurs de Dora - de toute façon on le l'entend pas alors il peut revenir à sa langue natale et s'ébrouer avec ses grandes ailes - Pascal, peste encore une fois, il n'aura pas le temps de répéter son alignement des poupées sur le final, il court sur la pelouse casquette aux couleurs africaines enfoncée jusqu'aux oreilles et pratique son anglais en appelant les leaders des grandes poupées "… yellow… red… vert, vert…". Martine qui n'a pas tout entendu les explications de Jean Raymond, exécute de grands mouvements en direction des tribunes ; bras en croix, pouces levés, pouce baissés, index dans les oreilles…
Ont-ils des jumelles là-haut ??? Bon… On fera comme on pense…

Conditions spectacle… rassemblement de nos 200 participants, Martine monte sur le tas de planches, qui se trouve aujourd'hui à l'entrée du tunnel - ne pas s'inquiéter, nous espérons que tout le "merdier" qui se s'amoncelle dans le tunnel disparaîtra le jour du show, aujourd'hui on fait comme on peu… - donc… juchée aux côtés de Stanley Mfanafuthi Mtombeni leader de poupée qui traduit "son" anglais en zoulou. Elle essaye de faire passer qu'une attente de 20 minutes est nécessaire avant notre intervention. Calme et sérénité seraient les bien venus dans le tunnel, on va essayer…
Tous se précipitent = 1ère consigne déjà oubliée…
Pascal dans le noir lance des chuuuttt… chuttt… le brouhaha monte, les voix résonnent, tous les danseurs sont dans les poupées… ouf… chuutt…, on entend les scratch des velcros des poupées qui se ferment - en allemand "Klettverschluss" - Roger et Martine entrent et sortent du tunnel, oreilles aux aguets sur le crincrin de la musique :

- c'est à nous ?
- non
- go !
- stop
- on nous donne le top ?
- merde trop tard
- quoi Jean Raymond 
- go !
- mais on le sait…!

Résultat, nous avons fait une très belle prestation, et de plus dans les temps.

Lundi soir 6 septembre

"Home sweet home"

Martine et le petit personnel

Nous sommes logés dans le quartier Troyeville au Troyeville hôtel, à entendre les rumeurs c'est un quartier chaud, dangereux, violent... Pour l'instant nous n'avons pas ressenti directement cette atmosphère. Toutefois la porte de l'hôtel est protégée par des gardiens armés. A 10 minutes à pied du stadium, des ateliers et du bureau, nous sommes au cœur de l'action. Tenu par la communauté portugaise il nous offre un couvert portugais abondant et varié, le poisson est à la table tous les soirs. La mer, je l'imagine derrière les buildings, elle vient lécher et nettoyer la tour Coca-Cola qui clignote toute la nuit, néons rouge blanc. (la Tour Coca-Cola à vous raconter une autre fois)

Dans le bar de 60 mètres carré, au bas plafond, 21 écrans de télévision sont allumés en permanence, un grand écran retransmet les matchs de foot. Que des hommes dans ce bar !

Le bar de l'hôtel Le coin billard

Notre apéritif de fin de journée s'égraine devant la météo… une série américaine… des débats politiques à dominante Blanche ou Noire… un documentaire animalier… un show télévisuel… un film policier… un résumé sportif… les informations en anglais, portugais, zoulou, afrikaners… des flashs publicitaires à ne plus en finir…
Une bouillabaisse sonore emplit la salle enfumée, c'est là que les ateliers s'échangent les informations, les impressions, les soucis de la journée, sans oublier les petits bonheurs.

Côté chambres il y a deux options ; les rudimentaires de 6 m2 avec lit simple, douche et toilettes à l'étage et les 50m2 deux étoiles avec double lit double. Les deux ont leurs avantages et chacun à presque pu choisir selon ses envies. Je ne vous parlerai pas des désavantages, aucune importance.La voix de Martine

Clefs, verrous, portes, grilles, fenêtres obscurcies,
Nous sommes à l'abri,
Le grand ciel bleu est dehors.

Mercredi 8 septembre


"Le limogeage du chauffeur de car..."La voix de Martine


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